Intervention de Michèle Peyron

Réunion du mercredi 10 avril 2024 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Peyron, rapporteure :

En premier lieu, j'apporterai une réponse sur la forme. Le rapport d'application n'est pas un rapport d'évaluation, étant observé que je m'attellerai à ce dernier le plus rapidement possible. Madame Maximi, tout comme vous je suis dans les starting blocks et un peu amère sur les manques constatés, de même que sur la manière dont le travail a été fait. Pour autant, il faut avoir conscience de la différence entre un rapport d'évaluation et un rapport d'application.

En second lieu, je traiterai des questions de fond et des explications des retards pris, dans l'ordre des articles.

L'article 7 a trait à l'interdiction de l'accueil hôtelier pour les enfants et les jeunes majeurs accueillis au titre de la protection de l'enfance. Pour cet article, un groupe de travail a été constitué, réunissant les conseils départementaux les plus concernés par l'accueil des mineurs et de jeunes de moins de 21 ans dans des structures autres que celles autorisées par le code, à savoir la Seine-Saint-Denis et les Hauts-de-Seine, ainsi que l'Association nationale des directeurs de l'action sociale et de la santé, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse, le Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux et la Convention nationale des associations de protection de l'enfant. Plusieurs partenaires, représentant notamment les conseils départementaux et les usagers, bien qu'invités, ne se sont pas présentés.

À l'issue d'une réunion de concertation organisée début juillet 2023, une version finalisée du texte a été établie. La rédaction issue de cette concertation constitue un équilibre entre les différents acteurs présents, portant des positions opposées quant aux normes à définir. Le projet de décret a recueilli par la suite l'assentiment du cabinet de la secrétaire d'État chargé de l'enfance de l'époque. Le Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) a rendu un avis négatif définitif lors de la séance du 7 décembre 2023. Le CNPE, saisi le 3 novembre 2023, a rendu un avis défavorable le 30 janvier 2024. Par conséquent, le décret a été mis dans le circuit de publication à la suite de la réception de l'avis du CNPE, puisque c'était le dernier à s'exprimer.

Le décret est le résultat d'une concertation au cours de laquelle des positions divergentes ont été exprimées quant aux normes d'encadrement à fixer, notamment en ce qui concerne la surveillance de nuit. Sa rédaction constitue donc un équilibre fin entre les diverses revendications et positions exprimées.

Cependant, le texte comporte des lignes fortes et des garde-fous, tels que l'interdiction de placer des mineurs de moins de 16 ans dans des structures relevant du régime dérogatoire. Le décret prévoit en outre l'obligation de s'assurer, préalablement au recours à ce type d'hébergement et tout au long de la prise en charge, que ce mode d'hébergement soit adapté à l'âge et aux besoins fondamentaux du jeune concerné.

De plus, le décret fixe l'obligation, pour le président du conseil départemental, de s'assurer par des visites régulières sur site, des conditions matérielles de la prise en charge. Il prévoit également une surveillance, de nuit comme de jour, au sein de la structure, par la présence physique sur site d'au moins un professionnel formé à cet effet, aux fins de garantir la protection des personnes qui y sont accueillies.

Comme annoncé dans mon avant-propos, je serai très vigilante quant à la formation de ces personnels, qui ne sont pour le moment que de surveillance, afin de déterminer s'ils sont en mesure d'accompagner les jeunes dont ils ont la responsabilité, aussi bien sur le plan de leur sécurité qu'au niveau de leur évolution personnelle et sociale.

En tout état de cause, il n'est pas inutile de rappeler le contexte général du vote de février 2022, qui s'est déroulé à la veille de deux élections majeures en France : l'élection présidentielle et les élections législatives.

Le premier décret d'application de la loi a été publié début août 2022, avant qu'une grande latence ne s'installe. Par la suite, nous avons subi des changements de secrétaire d'État ou de ministres délégué. De surcroît, certains partenaires intéressés par cette loi ne se sont pas présentés aux réunions, notamment les représentants des hôtels, de sorte que le Gouvernement a mené la concertation avec les personnes présentes.

L'article 9 prévoit la proposition systématique d'un parrainage et d'un mentorat aux enfants pris en charge par l'ASE. Des travaux ont été engagés avec les acteurs du parrainage et du mentorat à l'automne 2022. Dans le cadre de ces travaux, différents points juridiques ont été soulevés, portant sur les modalités de déclinaison de la disposition législative sur le plan réglementaire, notamment en ce qui concerne le contrôle des antécédents judiciaires et l'habilitation de l'association chargée de coordonner l'action de parrainage, au regard de la nécessité de maintenir une certaine souplesse du dispositif pour ne pas entraver le recours au parrainage et au mentorat.

Ces travaux ont permis d'aboutir à des projets de décret à la fin du premier semestre 2023, soumis à l'avis du CNPE et du CNEN en juillet 2023. Le CNEN a rendu un avis négatif lors de sa réunion du 7 septembre, confirmé lors de la séance du 5 octobre 2023. Le CNPE a rendu un avis sous réserve le 13 octobre 2023. Le processus de signature n'a cependant pu aboutir qu'après le changement gouvernemental, avec une publication en février 2024.

Pour rappel, l'article 32 rénove la politique de la PMI. Un projet de décret a été élaboré sur la base de travaux d'un groupe de travail technique piloté par la direction générale de la santé, qui a associé notamment des experts de la santé de l'enfant, des représentants des professions concernées et un représentant des départements de France désigné par Départements de France.

Cependant, la concertation avec Départements de France sur le projet de décret ainsi que les consultations obligatoires du CNEN et du Conseil d'État, et donc la publication de ce décret, ont été décalées en raison du lancement des travaux des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant. À cet égard, je vous annonce que le rapport des Assises de la pédiatrie, que j'attends depuis juin 2022, sera publié fin avril 2023.

En tout état de cause, l'absence de publication du décret à ce jour ne pose pas de difficulté, dès lors que les normes d'effectifs régissant l'activité des PMI et des centres de santé sexuelle existent déjà dans le code de la santé publique. De ce fait, il n'existe aucun vide juridique.

La publication du décret pourrait intervenir d'ici la fin de cette année, dès lors que les concertations en amont avec les départements de France, qui sont indispensables, auront pu être menées pour permettre le lancement des consultations obligatoires.

Le II de l'article 32 concerne la date d'entrée en vigueur des dispositions, qui seront intégrées dans le décret en Conseil d'État susmentionné. Il y aura un seul texte pour ces deux mesures.

Concernant les dispositifs médicaux de soutien à l'allaitement, l'arrêté fixant leur liste n'a toujours pas été publié. Les travaux sont encore en cours pour une publication dans les meilleurs délais, ainsi qu'il me l'a été indiqué.

Au titre de l'article 30, le GIP France enfance protégée est chargé, en application de l'article L. 421-7-1 du code de l'action sociale et des familles, de la base nationale de données des agréments des assistants familiaux et des assistants maternels. La création du GIP a donc été un préalable au lancement des travaux d'ingénierie des systèmes d'information prévus par la loi du 7 février 2022.

S'agissant de la base précitée, des concertations ont été engagées à l'automne 2023 pour réaliser un premier état des lieux. Parallèlement, le GIP a procédé au recrutement d'un chef de projet Systèmes d'information, chargé de la création et du déploiement de deux bases de données prévues par la loi du 7 février 2022.

Les travaux relatifs à la base nationale de données des agréments en vue d'adoption pouvant prendre appui sur un cadre déjà existant et ceux relatifs aux assistants familiaux et maternels nécessitant une expertise avec le système d'information de Pajemploi, la priorité a été donnée à la création de la base nationale de données des agréments en vue d'adoption.

L'article 35 prévoit la production d'un rapport sur la prise en charge par l'assurance maladie des actes et examens effectués par les infirmières puéricultrices dans les services de PMI. À ce jour, ce rapport n'a pas été rédigé, car il était prévu de l'articuler avec les travaux relatifs aux Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, à paraître à la fin du mois. Je ferai donc en sorte d'insister pour que l'ensemble avance enfin.

Enfin, concernant l'article 36 et le regroupement des instances nationales de protection de l'enfance, le décret prévu a pour objet de répartir, entre les départements, leurs contributions annuelles respectives pour le fonctionnement du GIP France enfance protégée. Ainsi, le décret du 25 septembre 2023 a fixé le montant de la contribution financière des départements au fonctionnement du GIP au titre de l'année 2023. Un décret similaire est en cours de préparation pour l'exercice 2024.

S'agissant de la création du système d'information du GIP et parallèlement, des travaux réglementaires le nécessitant, la date est fixée à fin 2024.

Telles sont les explications que j'ai recueillies concernant les retards, mais je reconnais la nécessité d'accélérer encore le processus.

Je ne m'exprimerai pas sur les MNA car je mène depuis janvier 2024, avec Elsa Faucillon, une mission pour le compte de la délégation aux droits des enfants. Notre rapport sera rendu fin juin. Après nous être rendues à Calais il y a une quinzaine de jours, nous serons demain à Menton et à Nice. À cette occasion, nous rencontrerons évidemment les représentants du département et de la préfecture.

Pour conclure, je reconnais que vous ne disposez que d'un tableau, mais pas encore d'avant-propos. La raison tient au fait que mon corapporteur et moi-même sommes encore en désaccord sur certains éléments. Par conséquent, dès que nous serons parvenus à un accord, ce que j'espère, l'avant-propos sera disponible.

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